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Un système de marquage moderne pour protéger une race bovine ancienne à Madagascar

mai 3, 2022

Hlazo Mkandawire et Jason Hopps

Le zébu occupe une place de premier plan dans la culture et l’économie malgaches. Cet animal qui se distingue par sa bosse et dont le prix d’une tête est évalué à plusieurs centaines de dollars assure la subsistance des éleveurs, de leurs familles et parfois de communautés entières dans l’île de l’océan Indien.

Malheureusement, cet animal de valeur constitue aussi une cible tentante pour les bandits, connus sous le nom de « dahalos » en malgache, dans un pays où la plupart de la population vit avec moins de 2 USD par jour.

D’après les estimations du gouvernement, près de 60 000 têtes de zébu ont été volées à Madagascar entre 2018 et 2020, privant les éleveurs d’années de travail acharné et de dévouement, sans parler de la perte de leurs revenus.

Cependant, un programme de marquage et d’identification soutenu par un projet d’agrobusiness de l’IFC à Madagascar devrait désormais aider les éleveurs à assurer la sécurité de leurs animaux.


Les zébus sont au coeur des moyens de subsistance des éleveurs à Madagascar

En fin 2021, le Président Andry Nirina Rajoelina a lancé officiellement le Système d’identification et de traçabilité du bétail (STIB) à titre pilote dans quatre régions du sud de Madagascar qui sont les plus pauvres du pays.

Dans le cadre du projet, il est prévu de marquer 80 000 zébus d’ici 2023, puis des centaines de milliers d’autres si les premiers résultats sont prometteurs.

« Ce système est essentiel parce qu’il permet de s’attaquer au problème du vol de zébus et de tenir des dossiers détaillés sur la santé des animaux, » déclare M. Harifidy Ramilison, Ministre de l’Agriculture et de l’Elevage. « Le partenariat avec l’IFC et le Gouvernement du Japon sur ce système permettra de transformer les modalités d’achat et de vente du zébu, d’améliorer les revenus des éleveurs et de réaliser des avantages sanitaires et économiques pour le secteur bovin. »

« Zebuscan »

Le fonctionnement du système est simple : une marque auriculaire infalsifiable avec un numéro d’identification unique est apposée à l’oreille du zébu. La marque et le numéro d’identification sont reliés à une base de données en ligne qui contient la photo de l’animal et des informations sanitaires et des informations d’identification.

Le processus s’appuie sur des smartphones où un logiciel spécial appelé « Zebuscan » est chargé. En cas de vol ou de perte d’un animal (la propriété de chaque animal étant confirmée par les autorités locales), l’éleveur le signale à la gendarmerie ou aux services sanitaires qui l’enregistrent alors dans la base de données. Un SMS est généré automatiquement pour alerter les autorités.

La beauté du système se révèle aux points de contrôle du bétail présents un peu partout sur le territoire national, aux marchés et autres points de vente. Grâce au système, les autorités peuvent identifier chaque animal et consulter la base de données pour vérifier s’il fait l’objet d’un signalement pour vol.

« Le nouveau système en ligne remplacera l’ancien système manuel qui est facile à falsifier, » note Amina Khaled El Zayat, Chargée des opérations principale de l’IFC. « Avec ce nouveau système, il n’est plus possible de transférer la propriété d’un animal ou de le vendre sur les marchés sans avoir effectué la vérification dans la base de données en ligne. »


Une refonte du 21e siècle

Des systèmes de marquage similaires ont fait leurs preuves en Europe, aux Etats-Unis et ailleurs. En Afrique, un certain nombre de pays tels que la Namibie, le Botswana et le Kenya ont été les pionniers du marquage des animaux.

A Madagascar, le rôle de l’IFC a consisté à conseiller le Ministère de l’Agriculture et de l’Elevage sur la mise en œuvre et l’exploitation du système et à aider le gouvernement à faire la transition à partir des dossiers d’identification sur support papier.

Bien que le nouveau système ait été généralement bien accueilli à Madagascar, certains éleveurs ont exprimé des préoccupations quant à son fonctionnement. L’IFC aide à répondre aux doutes à travers des sessions d’explication approfondie sur le système de marquage et de ses avantages.

« Les marques auriculaires sont plus fiables, ce qui m’a poussé à les avoir sur mes zébus, » dit Mara Tsaralahy, un éleveur malgache qui a participé au projet pilote STIB. « Avec ces marques, il est possible de retracer les zébus volés parce que toutes les informations, y compris le nom du propriétaire, se trouvent désormais dans la base de données. »


Une stratégie générale

Le projet de marques auriculaires fait partie d’une stratégie plus générale de la Banque mondiale visant à aider Madagascar à renforcer son secteur bovin, notamment par l’amélioration des services vétérinaires, les pâturages et même la reproduction animale et l’élevage.

Le Japon, par l’intermédiaire du Programme mondial d’agriculture et de sécurité alimentaire (GAFSP), contribue au projet à concurrence de 950 000 USD. En plus de son appui à ce projet en particulier, le Gouvernement du Japon est un partenaire de premier plan de l’IFC à l’échelle mondiale, ses appuis étant axés sur les projets de conseil dans les secteurs de l’agrobusiness, des chaines d’approvisionnement, de la santé, des infrastructures, de l’inclusion financière et des PME, entre autres secteurs.

A l’avenir, les responsables du projet à Madagascar envisagent d’ajouter une fonction de géolocalisation au système, un ajout qui serait facile à intégrer.

« Des améliorations simples en apparence telles que le système de marquage peuvent avoir un impact considérable sur la vie des gens ordinaires, » relève Marcelle Ayo, Responsable des opérations de l’IFC à Madagascar. « La technologie n’est pas une panacée mais son application peut apporter une solution à de vieux problèmes et la paix de l’esprit à ceux dont la vie peut dépendre de la sécurité d’une ou deux têtes de bétail uniquement. »

Publié en mai 2022